mardi 27 mars 2007

Le Jour d'après

Non, je ne commenterai pas ce soir le résultat des élections. J'ai écouté la soirée électorale en solitaire, dans une chambre d'hôtel, et j'ai passé la journée en formation, loin des journaux, de la télé, d'internet. Je n'ai rien lu, rien écouté depuis hier soir, après le discours de Jean Charest. Au fond, les résultats importent peu, du moins pour ce que j'ai ressenti hier soir.

Ceux d'entre vous qui m'ont lu savent que hier, c'est pour les candidats, élus comme défaits, que j'avais une pensée. Tous ceux et celles qui ont attendu des heures avant que le verdict ne tombe. Il faut soit l'avoir vécu, soit avoir été proche d'un candidat pour ressentir soi-même ce mal de ventre, cette nausée, cette envie de se terrer au fond de la salle de bain jusqu'à ce que la foule parte, que la télé s'éteigne, que le bruit arrête.

J'ai admiré la dignité de Boisclair. Cet homme, en sursis, qui a vraiment cru qu'il avait endigué le désastre jusqu'à la dernière minute. Peu importe ce qu'il a dit, hier c'était comment il le disait.

J'ai compris l'excitation de Dumont. Il a, depuis 13 ans, tenu à bout de bras ce parti, son parti. Imaginez les incessants aller-retour Rivière-du-Loup/Québec, sans compter les tournées de la province. Avec une équipe réduite, pas de chauffeur, pas de "staff" ou presque. Il a dû avoir des sueurs froides, hier, quand l'ADQ menait dans le grand tableau de Radio-Canada. Mieux que quiconque, il savait qu'il ne pourrait pas former un cabinet crédible et livrer la marchandise promise. Depuis hier, la marge de manoeuvre s'est rétrécie: maintenant, il doit aller au-delà du clip.

J'ai aussi ressenti le soulagement de Charest. Lui aussi, à quelque part, il est en sursis. Et il a frôlé l'humiliation suprême, celle de ne pas être élu dans son comté. Comme beaucoup de gens, j'ai aussi remarqué qu'il semblait stimulé par le résultat et que tout à coup, le Charest campaigner était réapparu. Je doute que ce soit suffisant, mais qui sait?

Hier soir, plus que jamais, j'ai vu 3 hommes face à leur destin. Et un Québec profondément schizophrène.

4 commentaires:

Folly a dit...

Même si je n'apprécie pas Boiclair, j'ai trouvé qu'il avait fait bonne figure dans les circonstances. La meilleure phrase pour moi (le lendemain) de lui est qu'il ne vivrait pas dans le déni. Mais j'ai de sérieux doute sur les autres membres du parti, les fans inconditionnels du PQ, certains médias, journalistes (pauvre Lise Payette et Claude Charron) et milieux syndicaux.

Un onde de choc qui ébranle les vieux partis et cela nous démontre, enfin, qu'on veut passer à autre chose que les chicanes péquistes-fédéralistes.

Est-ce que Dumont représente la solution? On va voir...

Bonne continuité dans votre plan de carrière.

P.S. si vous pouvez faire quelque chose au sujet de mon blogue et ma région, merci à l'avance: style comment dénoncer l'inacceptable alors que les mass-médias n'écoutent pas mon appel.

Anonyme a dit...

*Bravo pour ce blogue que j'ai suivi religieusement*

Pour ma part, ma pensé se résume ainsi pour le PQ:

La mort d’un pays et d’un parti politique

La dernière défaite du PQ laisse un goût amer pour plusieurs péquistes sur leur option de séparation. Plusieurs ont tenté d’expliquer les raisons tout en évitant de s’attribuer les erreurs. Depuis les élections, les commentaires que j’ai lus provenant de péquistes m’ont fait penser à une personne qui vient d’apprendre la mort d’un proche et qu’il doit maintenant vivre son deuil. L’analogie est frappante ! Voyons voir. Le premier symptôme d’un deuil est le choc et le déni. C’est à ce moment que la réalité va venir les rattraper. L’onde de choc et le déni des derniers jours sont frappants. Ensuite, la colère. Inutile de dire le nombre grandissant de personnes qui ont exprimé leur colère et la «tête» de Boiclair. Suivi de la phase de marchandage, c’est-à-dire les chantages. Dans le cas présent, si on avait fait alliance avec Québec Solidaire… L’avant-dernier symptôme du deuil est la dépression. Cette phase peut être longue : tristesse, remises en question, de la détresse. Finalement, l’acceptation. À ce moment les péquistes reprendront du mieux et leur réalité de perdre leur pays sera accepté et comprise. La fin du deuil s’exprime par une réorganisation de sa vie en fonction de la perte. Un adéquiste, un fédéraliste, ou simplement quelqu’un qui ne participera plus à la vie politique.

Edouard a dit...

Que de mélancolie, Gorge!

La schizophrénie du Québéc n'est peut-être pas si grave qu'elle ne le semble, en ce lendemain de "séisme électoral"!

C'est sûr que la perspective d'avoir Mario dans les pattes pour les 8 prochaines années (2 ans dans l'opposition et 2 mandats) ne m'enchante pas tellement, personnellement. J'ai peur qu'on perde des choses que moi et mes parents ont gagné de "hatue lutte", comme on disait.

Mais est-ce que les fleurs ne vont pas continuer de pousser? Mario lui-même ne l'a-t-il pas dit? En plus je pense que ça va peut-être stimuler la gauche: l'aube d'un nouveau "temps de cerise"? (http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Temps_des_cerises)

"Quand nous chanterons le temps des cerises
Les gai rossignol et merle moqueur
Seront tous en fête...
Les belles auront la folie en tête
Et les amoureux du soleil au cœur
Quand nous chanterons le temps des cerises
Sifflera bien mieux le merle moqueur
..."

(Pour avoir tout l'effet de cette chanson, il faut avoir en tête ou dans les oreilles, la voix sirupeuse de Yves Montant qui a repris ce vieux hit de la Commune de Paris.)

Heinh! A gauche, y'a pas qu'Amir Khadir qui connait la poésie!

Gorge profonde a dit...

@parler pour parler: Je ne sais pas si nous sommes vraiment sorti de la dynamique souverainiste/fédéralisme. Je ne donnerais personne pour mort à ce moment-ci, mais y'a des blessés tombés au combat, c'est sûr.
@Chris, l'analogie est intéressante. Mais je maintien que le PQ n'est pas nécessairement mort, pas plus que l'option indépendantiste. Une résurrection est toujours possible, vous savez!
@Edouard: mélancolique, vous trouvez? Nah,et depuis ce matin, en écoutant mes vieux Led Zep dans mon lecteur MP3, je pratique le "lâchez prise"...:-) Vous avez bien raison: les fleurs continueront de pousser, de même que le gazon qu'il faudra bien tondre un de ces quatre! Vous et moi, bientôt, nous pourrons reprendre en coeur le "maintenant je sais" de Gabin.